Summer nights 2018 ▶

« Woaw… Il n’a vraiment pas que le sourire de parfait. » Tandis que Yu Ri avait posé son coude sur la table, soutenant un visage affublé d’une large esquisse rêveuse, Sun Ri, elle, n’avait pas décroché de la scène. C’est vrai, sa soeur n’avait pas tord : leur guide au sourire enjôleur était également doté d’une bien trop jolie voix pour son bien. Celui de l’architecte en tout cas. Non, ça ne lui avait suffit visiblement de la chercher toute la journée et de la laisser un peu trop languissante le soir venu, il fallait aussi qu’il vienne la tourmenter à son hôtel, lui, son ukulélé et sa jolie voix. « Je crois que je suis amoureuse. » Le coeur de la blonde dérailla et elle lança enfin un regard presque révolté vers sa cadette qui venait de soupirer. Et heureusement que cette dernière n’y prêta aucune attention car le visage de l’ainée venait de se réchauffer indéniablement. Seulement cette fois, le soleil était couché depuis quelques heures.
Qu’est-ce qu’il lui prenait ? Yu Ri disait ça dès qu’elle voyait un garçon un peu trop charmant, rêvant que celui là aussi serait l’homme de sa vie. Elle avait le coeur faible Yu Ri, pour peu que le sourire soit un peu trop brillant. Et puis, elle avait l’âge en quelque sorte, Yu Ri…
Qu’est-ce que ça pouvait bien faire à Sun ? Elle n’avait même pas à la mettre trop en garde car elle n’avait encore jamais vu sa soeur avec le coeur brisé. Yu Ri était plus robuste qu’elle ne le laissait croire, de ce fait, elle n’avait vraiment pas à s’inquiéter de ses amourettes….
Alors pourquoi ce regard ?
Peut-être que cette seule phrase avait un peu trop fait réagir son coeur… et qu’elle avait trouvé si idiot qu’elle s’était énervée toute seule… et même pas contre sa soeur.
Amoureuse… ?
N’importe quoi.
Sous le charme….
Ça…
Damn it.

Il l’avait prise au dépourvu. Non, c’était certain, même si elle s’était dit qu’elle pourrait retourner le voir avant la fin du séjour, elle ne s’attendait pas à le revoir apparaître ce soir. Encore moins dans ce contexte.
C’est qu’il savait vraiment tout faire, en fait ?
De toute évidence, il aurait très bien pu être celui qui lui aurait servi son cocktail. Son verre, néanmoins, Sun n’y toucha plus durant toute l’heure suivante. Elle n’était pas sûre d’avoir décroché un mot. Peut-être de vagues réponses aux commentaires enflammées de sa soeur… et encore. Le fourbe mauricien ne l’avait que trop bien capturé à nouveau. Quand elle aurait dû seulement apprécier le fond musical, elle se sentait un peu fasciné par ce garçon qui jonglait avec ses instruments pour délivrer toute sortes de chansons qu’il menait un peu trop à bien…. pour le traitre organe qui battait dans sa poitrine. Celui-ci avait d’ailleurs tendance à dérailler chaque fois qu’il croisé un regard… hasardeux, n’est-ce pas ?
Hum.

« J’ai envie d’apprendre à parler espagnol. » Sur ce dernier commentaire des plus subtiles de la cadette, la fin du numéro sembla être venu. Le public applaudit, Yu Ri aussi et plus timidement, Sun suivit. Mais elle sentait ses joues un peu trop chaudes et se surprit à s’éventer d’une main. Bonne soirée au paradis… Elle ne savait pas trop pourquoi, mais cette phrase l’énerva. De qui se moquait-il ? Fourbe, fourbe mauricien… Et surtout, elle devait se reprendre ! Elle ne s’était probablement jamais montré aussi attentive de sa vie… et pourtant, Dieu sait qu’elle aimait l’architecture !
Et l’architecture de Maurice… ?
Des monuments bien bâtis ça, oui…
Quels monuments… ?
Bref.

Elle faisait mieux de se reprendre, et vite, car l’ennemi approchait à grand pas. Elle ne su trop pourquoi son seul réflexe fut d’attraper son verre et d’engloutir son cocktail d’une traite. À ne pas reproduire chez vous les enfants. L’idiote. Au lieu de lui rafraichir les idées, ça n’avait que fait que raviver le feu sur son visage. Chaud, elle avait bien trop chaud.

« Bonsoir Jin Hwa ! » lança un peu trop joyeusement Yu Ri. « Bonsoir, » souffla l’ainée à sa suite d’une voix légèrement plus trainante. « Quelle prestation surtout ! Tu ne nous avais pas dit que tu travaillais ici ! » Ah ça non, tiens ! « Ni que tu étais chanteur. » Ce qu’elle voulait dire, c’était peut-être : que tu chantais si bien. Mais ça lui avait brûlé la langue. Peut-être se le serait-elle permis si sa soeur ne l’accompagnait pas. Ses yeux trouvèrent ceux de Jin Hwa et il y brillait une demi lueur de rapproche…. mais la demi restante n’était autre qu’excitation. À quoi jouait-il ce Mauricien ? Jouait-il seulement, ou bien était-ce juste elle qui se faisait des films ?
Elle n’avait pourtant pas inventé ces regards…

Sun Ri se mordit pour la énième fois de la journée sa lèvre inférieure. Une bonne soirée, hein ? Elle sentit un sourire s’installer au coin de ses lèvres. « Comme une soirée au paradis, je suppose. » Qu’est-ce qu’il lui prenait de dire ça ? « Le chanteur aide beaucoup. » Sun pinça les lèvres, réprimant sa contrariété. Yu Ri venait de lui lever les mots de la bouche mais elle adressa un regard appuyé au chanteur en question. Après tout, c’était l’idée. « Tu as un très bel accent espagnol, en tout cas. » Une très belle voix, Sun… une très belle voix. C’était ça que tu voulais dire.

( Pando )

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Serrant doucement le dossier de la chaise de ses doigts, il avait adressé un nouveau sourire aux deux coréennes. Un sourire qui s’était évidemment agrandit à leurs remarques. Devait-il leur parler de l’effet de surprise, indispensable dans une bonne stratégie ? Non, évidemment que non. Un commercial ne révélait jamais ses secrets !
Ce n’était pas plutôt pour les magiciens ça ?
Peu importe ! C’était pareil ! Des petites astuces pour transporter, convaincre jusqu’au bouquet final dont on ne voulait très sincèrement pas connaître la nature. Il semblait déjà en être assez certain pour tout le monde de toute manière. « Ah oui ? J’ai dû oublier.... » retire cet air de ton visage petit con. Et non, ne le tourne pas non plus vers la dénommée Sun Ri. Tu la cherches ? Tu ne vois pas ce petit air de reproches tout spécialement dirigé vers toi ?
Si. « Je travaille un peu partout. » c’était vrai. Il ne “dépannait” pas uniquement dans l’hôtel où il se trouvait actuellement. Et il ne faisait pas toujours qu’y chanter. En réalité, il travaillait là où il y avait besoin. Il n’était même pas très regardant pour parler franchement, quand il y avait du boulot, il prenait et ça avait le don d’exaspérer Dae Hyun « Et un peu dans tout. Mais ça, je suis sûr de vous l’avoir dit. » Oui… il ne faisait pas que vendre des beignets sur les plages.

Est-ce qu’il devait proposer de l’aide à Sun Ri ? C’était une question qui lui avait traversé l’esprit. Et si on pouvait se demander de quoi il parlait… c’était de sa lèvre naturellement. C’est vrai, lui aussi, il aurait bien aimé la manger. Pas que sa lèvre d’ailleurs. Ce soir, elle lui semblait encore plus appétissante que cette après-midi « Elles peuvent toujours être encore meilleures, tout dépend de ce qu’on en fait. » …
….
………..
C’était un sous-entendu ça ? Une proposition ? Qu’est-ce que tu venais de lui dire en soutenant son regard ?
Elle comprendrait ce qu’elle avait envie de comprendre. En d’autres termes, elle comprendrait ce qu’il y avait à comprendre.
… et non, il ne doutait toujours de rien.
Il ne voulait pas plutôt répondre aux compliments ? Il adorait ça qu’on le complimente non ?
« Merci, c’est gentil. » et comme tout accro de la musique, il adorait qu’on le fasse dans cette matière. A 12 ans, on le trouvait juste mignon à chercher les cordes sur son ukulélé. Aujourd’hui, il avait progressé, même en espagnol « C’est parce que j’en ai beaucoup dans mon répertoire, la pratique. » une réponse normale, mais que lui arrivait-il « Et puis, j’ai aussi des origines hispaniques, forcément ça aide ! » … on se disait bien « Ma qué, yé ça dans le sang ! » …….. Park Jin Hwa, tu es une personne extrêmement fatigante, et on espère que tu en as un peu conscience !

« Vous êtes très jolies ce soir. » il était poli, il était obligé de s’exprimer au pluriel. A la vérité, Sun Ri éclipsait sa soeur. On ne pouvait pas la blâmer pour ça, elle ne le faisait pas exprès !
Et maintenant ? Il n’était pas supposé les laisser profiter de leur soirée en paix ? Comme un gentil petit guide/vendeur de beignets/animateur ? Il allait avoir des soucis avec la direction s’il importunait trop les touristes. Ce n’était pas ce genre de trucs où on était supposé être présent pour eux, toujours prêt comme les scouts, tout en leur laissant de l’air pour ne pas gâcher leur paysage ?
Si, en général, ce n’était jamais trop bien vu de sympathiser avec les clients. Mais il ne travaillait pas réellement ici, il n’était que de passages occasionnels en règle général, on n’allait tout de même pas lui reprocher de discuter un peu avec ses touristes de l’après-midi !

( Pando )

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Il avait oublié ? Tiens donc. Les yeux de la blonde se plissèrent légèrement, laissant une lueur de suspicion briller au fond de son iris. Elle avait beau ne le connaitre que depuis moins d’une journée, Sun n’avait aucun doute : ce fourbe mauricien se jouait d’elle. Etait-ce vraiment si grave ? Non, en vérité, pas tellement. Qu’il soit là par hasard ou non, la jeune femme ne lui en voulait seulement que parce qu’elle s’était laissé un peu trop avoir. Et elle qui détestait perdre, elle devait admettre à contre coeur qu’il l’avait bien eu… mais cette défaite - qui n’en était aucunement une en vérité - ne valait-elle pas le coup ? N’avait-elle pas que trop apprécié sa prestation ?
Un peu trop, à vrai dire. Ses joues étaient encore rouges et si elle pouvait désormais mettre ça sur le compte de l’alcool, la chaleur qui l’entourait n’était pas qu’innocente.
Au fond… ne se sentait-elle pas heureuse de retrouver ces yeux là ? Après une journée entière à jouer avec, elle avait manqué de s’ennuyer ce soir… non ?

S’ennuyait-on lorsqu’on passait une soirée au paradis ? Cette phrase lui tournait dans la tête et la réponse de Jin Hwa avait laissé une nouvelle lueur brillante dans son regard tandis que son sourire en coin peinait à s’effacer. Elle se demandait bien ce qu’il suggérait pour passer une meilleure soirée… quelles activités proposerait-il lui, le si parfait guide de l’île Maurice…
Mais si la bouche de Sun s’entrouvrit, elle sembla se retenir de poser la question, tandis que sa langue venait s’appuyer contre sa joue. La cause de son mutisme ? Probablement la présence de sa soeur qui elle se montrait plus bavarde. Elle ne lui voulait cependant pas tant. Elles étaient là ensemble après tout et… Il lui semblait qu’ils n’avaient pas eu tant besoin de mots pour communiquer cet après-midi.
Aussi se contenta-t-elle d’un compliment sur son accent espagnol. Rien d’alarmant au moins.

Si ce n’était que Jin Hwa arrivait à la faire sourire pour une réponse aussi sérieuse et simple… que pour le bêtise qui suivit. Yu Ri rit, franchement amusée. Sun aussi, bien qu’elle l’étouffa doucement en détournant la tête, qu’elle secoua ensuite. Le mauricien bridé avait du sang espagnol maintenant… sérieusement ? « Bien sûr, suis-je bête. Ça aussi, ça se voit un peu. » Elle agita sa main déployée devant son propre visage pour illustrer. « En tout cas si tu as aussi des compétences en enseignement, j’ai toujours rêvé d’apprendre l’espagnol. » Yu Ri lança un clin d’oeil à celui qui venait de susciter cette vocation de « toujours » et Sun ne put s’empêcher de se moquer légèrement en étouffant un rire. Sa soeur la désespérait parfois. Ceci dit, elle n’était pas vraiment mieux qu’une adolescente aujourd’hui… « Mais c’était vraiment bien, ta prestation. » Ah ! Enfin, elle le crachait son compliment, le vrai. Un sourire plus sincère étira ses lèvres. Il le méritait après tout, en dépit de sa fourberie.

Et à quel point c’était fourbe de les complimenter ? Techniquement, ça ne l’était pas. Jin Hwa était seulement poli. Ou complètement sous le charme, selon Yu Ri. Celle ci souriait tellement qu’elle risquait une crampe aux joues. Elle dissimula sa bouche un instant, comme gênée avant de rétorquer : « Pas autant que le chanteur de ce soir ! » Est-ce qu’elle en faisait trop ? Est-ce qu’elle avait tord ? Sun considéra une longue seconde le garçon qui leur faisait face. Il était toujours aussi charmant, même habillé… Le sourire devait y être pour beaucoup. « Merci, c’est gentil. » Il était seulement poli, mais elle était contente d’avoir enfilé cette robe, sous laquelle son coeur s’était mis à battre plus fort.

« On t’offre un verre ? » Jin Hwa n’avait pas l’air d’avoir envie de partir et à vrai dire, sa compagnie ne gênait pas l’ainée. Inutile de se demander pour la cadette. « Pour te remercier de le journée. » Bon, elle l’avait payé techniquement mais, ça n’en restait pas moins une très bonne journée… qui laissait de nouveau un sourire un peu rêveur sur les lèvres de l’architecte tandis qu’elle perdait machinalement son regard sur ce fameux guide… Etait-ce vraiment une bonne idée que de le retenir ? « Oh, ça serait un honneur de passer un peu de temps avec la star de ce soir ! » Sur ce ton léger, au fond, Yu Ri ne plaisantait qu’à moitié. Mais elle n’avait sûrement pas tord : elles allaient faire des envieux.

( Pando )

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C’était quoi ça ?
Une petite pointe d’accusation dans le regard.
Oui, pourtant, on sait, il le niait avoir fait exprès. Sa présence ici ce soir n’était que le fruit du hasard, le sauvetage d’un ami et son oubli de mention pour le reste… disons qu’il le devait à sa distraction. Qui ne serait pas discret quand il passait l’après-midi à faire visiter un petit paradis à une créature aussi charmante que Sun Ri ? Personne ne pourrait lui jeter la pierre pour ça !
On pourrait en revanche davantage le faire sur ses prétendues origines hispaniques. On ne savait pas vraiment d’où il les tenait, et écouter en quantité des chansons en espagnol ne faisait pas de lui le nouveau Enrique Iglesias ! Il n’en devenait même pas un parent éloigné ! « Décidément, rien ne t’échappe à toi.... » non, il ne retirerait pas ce petit sourire de ses lèvres. Il avait déjà la capacité de ne pas laisser paraître que Yu Ri était de trop. Il était poli et c’était un galant homme notre Iglesias ! « Tu sais, je baragouine quelques mots seulement. » non, il ne comptait vraiment pas lui faire gober qu’il parlait la langue aussi bien que s’il était né avec ? « Mais si tu veux des cours de français, entraîne-toi avec.... » petite pause et puis le ton suave reprenait le dessus pour souffler des mots pourtant pas si érotiques en français « Jambon beurre. » …
Quoi ? On pouvait dire n’importe quoi en français, ça passait pour sexuel ! Quand on y mettait un peu du sien.
Quelle importance à quoi il préférait son sandwich quand la jolie Sun Ri se décidait à lui faire un compliment auquel il répondait d’abord d’un sourire « Si tu as passé une bonne soirée un peu grâce à moi, alors ça me va. » “vous” Jin Hwa “vous”. Le compliment venait de l’aînée, il était bien normal de lui répondre à elle !

Et puis, ne venait-il pas de compliment les deux ? Si, mais on avait envie de lui dire qu’il aurait pu s’abstenir !
Lui, il nous dirait que s’il n’en n’avait pas fait mention, il serait passé pour le plus aveugle des hommes « Tu me flattes ! » “continue” ou bien pensait-il actuellement “mais je n’ai pas les courbes de ta soeur” … ça pouvait être les deux, libre à vous de décider ! Quoiqu’il en soit, la demoiselle qui rendait une robe jaune bien plus jolie avait eu le droit à un sourire supplémentaire pour ses remerciements avant qu’une invitation qu’il était supposé décliner ne soit prononcé.
Quoi ? Tu vas lui dire que c’est gentil mais, qu’étant donné que tu comptes t’inviter dans son lit ce soir, tu ne voudrais pas abuser ?
Trop direct, bien trop. Il préférait d’abord sourire, comme souvent, faire semblant de réfléchir, juste un peu, puis répondre ensuite « Si c’est pour me remercier, ce ne serait pas poli de refuser. » … Bah oui… il était bien élevé lui !

Tirant finalement la chaise à laquelle il se tenait jusqu’à présent, il y avait pris place avant de plaisanter avec la cadette « Ne mens pas, je suis sûr que tu as préféré le numéro d’avant. » elle n’était pas là quand il était arrivé, on en doutait. Est-ce qu’il cherchait sincèrement plus de compliments ? On lui accordait, la dame de ses pensées était un peu plus pingre que sa cadette, mais il finirait bien par décrocher bien plus agréable un peu plus tard dans la soirée « ça vous a plus d’ailleurs ? » c’était quoi déjà ? Il avait oublié ? Ce n’était pas ce spectacle avec quelques scènes entre les sketch et quelques danses ? Oui, il lui semblait bien que c’était ce fameux truc où ils faisaient participer les clients de l’hôtel.

( Pando )

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« Il parait que je suis quelqu’un d’assez perspicace. » Assez pour que la lueur mutine dans ses yeux qui pointait le mauricien ne disparaisse pas. Tout comme son petit sourire, visiblement indéfectible en sa présence. Une présence hasardeuse comme l’avait si bien souligné Jin Hwa.
Quand ce dernier suscitait une amusante suspicion du côté de l’ainée, il provoquait chez la cadette une soudaine soif d’apprendre. Est-ce que ça avait avoir avec le sourire du professeur ? Assurément. En vérité, Jin Hwa aurait très pu lui parler espagnol, chinois ou italien, pourvu qu’il lui « apprenait »… Mais le français, c’était encore mieux. Yu Ri ouvrit de grands yeux, à l’instar de ses oreilles, et son sourire ne fit plus excité que jamais. « Oh j’adorerais ! » Le français, berceau du romantisme, de l’élégance et la gastronomie…. Alors comment ne pas plaquer ses deux mains sur sa bouche au premier mot prononcé qui ne pouvait avoir qu’une signification passionnée, voire un peu érotique… « Jambon beurre… » répéta-t-elle sur un ton presque précautionneux comme une formule magique interdite. Son regard brillait d’excitation et la joie embaumait son coeur. Elle en était certaine : c’était le début de la victoire pour conquérir le coeur mauricien car il venait d’établir un lien qu’eux seuls pourraient comprendre.
Aaaah, si seulement elle avait au moins demandé ce que ça voulait dire. Jin Hwa était presque gentil ne lui avoir soufflé que le nom d’un sandwich.

Si Sun n’avait pas la moindre idée de ce ça voulait dire, nul doute que ça avait rendu sa soeur heureuse. Elle glissa un regard un peu décontenancé de son côté, quoiqu’elle était habituée. Puis ses yeux se reposèrent sur celui qui accumulait les compétences. C’est vrai qu’en passant la journée avec Jin Hwa, elle avait presque oublié que l’île était française. Mais elle semblait oublier beaucoup de choses quand il était là. Ses lèvres retrouvèrent leur esquisse.
Une bonne soirée… le mot lui semblait presque faible. « Très bonne. Merci monsieur le guide. » Aucun doute, ce garçon rendait leur séjour encore plus intéressant.

Alors, elle pouvait bien l’inviter à prendre un verre avec elles. Même si elle avait payé sa prestation, il pouvait voir ça comme un pourboire bien mérité et puis… maintenant qu’il était là, il aurait été dommage de le laisser filer si vite, n’est-ce pas ?
Sa réponse n’avait pu que la faire sourire et l’amusement avait fait briller ses yeux. À moins que ce ne soit l’alcool. « Non, en effet. » Elle l’invita à prendre place en face d’elle, le suivant du regard jusqu’à ce que sa soeur en rajoute. Tandis que Yu Ri secouait la tête pour démentir et argumenter d’un « Non, je n’étais pas là avant, je pense que c’est ton talent qui m’a appelé, » Sun levait le bras pour appeler un serveur. C’était comme ça qu’on faisait ici non ?

Elle reporta son attention sur le jeune homme à sa question. « Quoi donc ? » demanda l’ainé l’air un peu discret tandis que son regard se perdait de nouveau dans celui du mauricien. « Le numéro d’avant ou la journée ? » Ses doigts coururent sur la table, contournant le téléphone qu’elle était en train de consulter juste avant l’entrée en scène du garçon. « Parce que j’avoue que je n’y ai pas vraiment prêté attention… » S’il s’agissait de blagues, elle ne risquait pas d’en comprendre beaucoup. « En revanche, aujourd’hui… c’était vraiment plaisant et… intéressant. » Les paysages ou le guide ? Les deux. « Et avec le bonus ukulélé je dirais que ça vaut…. 4,5 étoiles ! » Sur 5 bien entendu. Elle ajouta d’un sourire plus mutin, l’index barrant sa bouche : « Parce que c’est toujours bien de se laisser une marge de progression. » Ah oui, t’espérais quoi de plus pour la prochaine excursion ? Ne répond pas.

Un serveur arriva enfin à leur table. « Alors, tu bois quoi ? » Yu Ri commanda un cocktail sans alcool à base de fruits locaux et Sun, bien qu’elle fut tentée de recommander le même qu’elle venait d’avaler, se contenta d’un Panache. Elle voulait éviter d’être trop ivre en présence du jeune homme… et surtout de sa soeur.

( Pando )

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Oui, elle était perspicace, elle lisait même son avenir pour la soirée entre les lignes de ses yeux, quelque chose comme ça. Lui, il lisait la connerie au quotidien à le voir souffler un “jambon beurre” comme s’il parlait d’huiles de massages érotiques aux noms de parfums scandaleux. Aaah ça oui, ce n’était pas donné à tout le monde de faire de la publicité dans le monde de l’érotisme, et certains n’avaient hérité que des sandwich ! Mais après tout, fallait bien les faire aussi les baguettes ! Alors il ne s’en plaindrait pas ! Il ferait vaillamment - ou scandaleusement - avec ce qu’il avait « C’est pas mal, tu pourrais presque déjà passer au niveau au-dessus. » c’était quoi ? Raclette ? Petits-fours ? Bibliothèque ? Non ça, bibliothèque, c’était un double porn, il ne fallait pas non plus faire preuve de trop de scandales.
Mais bien sûr.
Il n’allait pas non plus lui apprendre des noms de position ou des suggestions scandaleuses ! Yu Ri n’était même pas mineure !
Parce que lui, il l’était ?
Passons.

Il n’avait pas lister tous les ustensiles que l’on trouve dans une cuisine dans un français appliqué de toute manière, et la conversation était devenue plus sage pour laisser passer un nouveau sourire sur ses lèvres au son des remerciements de la belle. Puis il avait trouvé sa place à une table à laquelle il n’aurait peut-être pas dû s’asseoir, il était trop tard pour se poser la question, quand il se disait poli et bien éduqué, voilà tout « J’ai fait ça moi ? » il appelait les jolies coréennes juste en chantant ? C’était bon à savoir…. Au détail près, qu’il ne reconnaîtrait pas publiquement, que la présence de Yu Ri ne l’arrangeait pas vraiment. Si la cadette des Bae ne s’était pas trouvé là, il aurait pu proposer un tour sur la plage à l’aînée. Il le regrettait, de ne pas pouvoir passer un moment seuls avec Sun Ri. Faire plus ample connaissance… et tout ce qui allait.

Ils ne faisaient pas déjà connaissance maintenant ?
Si. ça manquait de promenade sur la plage mais il faisait bien avec « Les deux puisqu’on y est. » … pauvre équipe d’animation qui avait récolté moins d’attention que lui. Non, évidemment, il ne s’en plaindrait. Il était sûr qu’ils avaient bien trouvé d’autres personnes pour être à l’écoute. Tant qu’il avait son public lui « C’est dommage, tu as sans doute loupé un très beau numéro de jongleurs. » et on est certain que tu peux te proposer pour lui en faire un, là, maintenant, tout de suite.
Non, il aurait préféré lui montrer d’autres talents cachés qu’il possédait… mais il savait faire preuve de patience et tenir une conversation civilisée « En général, j’arrive à obtenir au dessus 5, j’ai fait quelque chose de travers ? » tais-toi et range cet air un peu boudeur. Commande quelque chose et sans alcool s’il te plait ! Il l’avait fait, il avait pris un cocktail même. Vraiment, un sans alcool, y’avait pas un peu de rhum là-dedans ? Il donnait son verre à goûter sans la moindre peur pour le prouver ! Il suivait le modèle du non alcoolisme « Mais j’ai encore une chance de me rattraper. » en faisant exploser le score plus tard dans sa chambre ?
En commençant par la travailler à nouveau au regard. Tout commençait par les jeux de regards.

( Pando )

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« J’ai hâte d’en apprendre davantage. » La joue négligemment posée dans le creux de sa main, Yu Ri contemplait leur guide, et son nouveau professeur de langue, de ce regard rêveur et brillant. Nul doute que s’il lui avait proposé une leçon particulière dans sa chambre, la jeune fille n’aurait pas hésité longtemps. En attendant, elle se contentait de répéter inlassablement dans sa tête, ce mot français gorgé d’érotisme qui faisait battre son coeur d’une excitation certaine : jambon-beurre.

Heureusement, sa soeur lui permettait un peu plus de profiter de sa présence en l’invitant à prendre un verre en leur compagnie, ce qui ravissait la cadette qui n’en quittait pas son sourire. Elle avait définitivement bien fait de rejoindre son ainée plus tôt… à moins que ce ne soit le destin ? « Assurément. Même ma soeur a décroché de son téléphone pour t’écouter. Seul un grand talent peut réussir cet exploit. »
Celle que l’on venait d’amener à son insu dans cette conversation tourna la tête vers sa soeur. Qu’est-ce qu’elle disait cette petite sotte ? Son regard passa de Yu Ri, à son téléphone, puis à Jin Hwa. Et c’est en croisant ce dernier qu’elle sentit une petite bouffée de chaleur mordre ses joues. Probablement parce qu’elle n’avait pas tout à fait tort… Elle n’avait relevé les yeux de son téléphone qu’en entendant la voix familière du garçon. À la différence près que là où Yu Ri insinuait que Sun était plongé dans son travail resté à Séoul, elle était en vérité en pleine contemplation de la merveilleuse après-midi qu’ils avaient passé tous les trois. Elle s’éclaircit la gorge et roula doucement les yeux au ciel en replaçant une mèche blonde derrière son oreille. « C’était… Hum… Oui, c’était assez captivant. » Mais n’avait-elle pas déjà complimenté le bougre ? Si, mais ce n’était visiblement pas assez.

De sa distraction, elle du donc avouer une nouvelle fois qu’il n’y avait bien eu qu’un numéro qui l’avait intéressé. Retrouvant le regard de Jin Hwa, elle sourit dans un rire silencieux : « C’est dommage oui… Mais j’suis sûre que ça aussi, tu sais faire. » Et quoi, tu allais lui demander de jongler maintenant ? Ou plutôt qu’il te fasse un numéro privé ? Hum. Elle ne pensait à rien, elle énonçait juste une simple supposition. Quant au reste, elle pensait avoir honnêtement noté la prestation de leur guide : et obtenir un 4,5 de la part de l’intransigeante Sun, c’était un bel exploit. Mais ce score ne sembla pas plaire à Jin Hwa et son air boudeur lui fit arquer un sourcil. Pourquoi le trouva-t-elle insupportablement mignon ? « Oh non, c’était parfait ! » se pressa de rattraper Yu Ri. « Ma soeur est juste trop sévère. » La soeur en question - qui n’avait pas eu le temps d’en placer une avant sa cadette - pinça les lèvres dans une moue désapprobatrice avant de secouer la tête : « Je dis simplement que c’est bien de se laisser une chance de faire mieux. » Et tu comptes le connaitre comment ce mieux ? Bah, elle avait bien l’intention de faire à nouveau appel à ses services… mais ça, Jin Hwa sembla le comprendre car, le serveur parti avec leur commande, il ajouta cette phrase qui ne pouvait tromper. Instantanément, Sun retrouva cette lueur dans le regard en croisant le sien. Une esquisse qu’elle ne semblait réserver qu’à lui se re-dessina aux coins de ses lèvres. « C’est ce que je voulais entendre. » Un bon esprit, c’est ça ? Pourquoi vos regard donnez l’impression qu’il y avait plus qu’un bon esprit… ?

Son indexe fit distraitement le tour de son verre vide et comme une manie qu’elle ne pouvait empêcher, se mordit la lèvre. « Je me disais juste que j’avais beaucoup aimé découvrir ton île et qu’il y avait forcément d’autres coins à voir… » Et évidemment, il n’y avait qu’un seul guide qu’elle désirait ? Voulait… Voulait était un terme plus approprié….

Leurs verres furent servis, Sun remercia le serveur et récupéra son verre qu’elle leva vers Jin Hwa. Yu Ri l’imita et en choeur, les deux soeurs déclarèrent joyeusement : « À notre guide ! »

( Pando )

ETE 2018 ▶

« La motivation, c’est la clé de l’apprentissage ! » tu viens de l’inventer celle-là ? T’étais pas plus partisan de trucs comme la “passion” ? C’est vrai, à son sens, il fallait encore plus de passion que de motivation pour apprendre… mais d’un autre côté, l’un n’allait pas sans l’autre.
On allait débattre longtemps là-dessus ?
C’était terminé. Ce soir, il n’avait pas le temps pour les débats. Il était occupé à sauver la civilisation de la téléphonie… ce danger public de toutes vacances si on voulait toutefois les réussir en les remplissant de souvenirs.
Tu vas encore la disputer ? Tu sais, elle ne s’est sans doute pas encore remise de ta grande leçon de moral du matin. Vas-y mollo quand même Jin Hwa, c’est pas bien d’effrayer les touristes.
Bref, on était prêt à parier que t’étais plus que content de toi maintenant hein ? Réussir à faire perdre à un téléphone de si jolis yeux, y’avait de quoi être fier non ? Il l’était, s’il était captivant, oui, il l’était. Mais il n’avait d’abord fait que le traduire d’un sourire, parce qu’il pouvait être aussi très pénible au lieu de préférer la discrétion, avant de demander  « Et qui est mon adversaire dans la quête de l’attention ? » au moins, pour Yu Ri, il ne semblait en avoir aucun. Normal en même temps, personne ne résistait au coup du “jambon-beurre”, classique.

Et tout le monde le préférait à la guitare ou au ukulélé plutôt qu’avec des balles ou des oranges ?
… il était pas trop mauvais pour jongler. Venant d’un pitre comme lui, ça n’avait rien d’étonnant quand on y pensait « J’ai appris à jongler avant même de savoir marcher. » c’est faux !
Disons plutôt que c’était en partie faux. Dae Hyun qui s’occupait les mains s’était lancé dans l’idée d’apprendre à son cadet à en faire autant. A l’orphelinat, ça pouvait être chiant, les journées… elles étaient la plupart du temps trop longues. Et si on partait du principe que le mauricien estimait avoir réellement appris à vivre dans le pays qu’il définissait comme celui de son coeur… oui, il pouvait prétendre avoir appris à jongler avant d’apprendre à marcher. Même si ce n’était vraiment qu’à Maurice qu’il avait appris plus que les bases avec autre chose que deux citrons volés dans les cuisines d’un orphelinat.

Et pour son jonglage, il estimait mériter quelle note ?  Il allait bouder s’il n’avait pas un 5 au minimum ?
Ce n’était pas lui qui donnait les notes… mais disons que s’il venait à montrer ce talent, un 5.2 serait plus que mérité.
Petit vantard.
« Je vois ça Yu Ri, moi qui pensait avoir fait mieux que ça. » t’as pas bientôt fini oui avec ta “pouty face” ? Il arrêtait, promis il arrêtait. Il se lançait dans les efforts, les vrais, il promettait de décrocher une note bien au-dessus de la maximale plus tard dans la soirée.
…
Quoi ? Il était encore plus doué pour ça que pour le jonglage. Il n’avait eu besoin de maltraiter aucun citron, aucune orange pour ça.
C’est bien, Brigitte serait fière de toi. Maintenant est-ce que tu voudrais bien arrêter ce jeu de sous-entendus qui passait par les regards ?
Non. C’était une trop bonne partie pour la sacrifier « Sévère ou non, tu vas devoir envisager de me mettre la note la plus haute de ta carrière. » Sun Ri était juge ? Fallait croire !

Elle ne manquait en tout cas pas de goût. Pour aimer son île et pour tendre la perche au meilleur guide du coin d’offrir à nouveau ses services. Comment résister à une demoiselle qui savait si bien maltraiter sa lèvre ? « Si vous voulez remettre ça demain, ça peut s’arranger. » t’avais pas un truc de prévu toi ?
Jamais de problèmes il n’y avait avec Jin Hwa ! Que des arrangements ! « Je veux bien même avoir la clémence de vous laisser dormir un peu.  » oui bon pas 12h non plus, fallait pas déconner « Vous avez eu une grosse journée...  » et la nuit sera longue… ?
Pourquoi tes yeux ont l’air de murmurer ce genre de mots scandaleux dans ceux de Sun Ri ?
Ah oui ? Curieux ? Lui il n’était qu’un innocent qui avait levé son verre pour trinquer
« Alavot !  » hein ?  « C’est comme ça qu’on dit chez nous.  » tu veux pas te contenter de rester sur le français ?

( Pando )

Summer nights 2018 ▶

« Ton adversaire ? » Elle arqua un sourcil qui fut souligné par un sourire mutin, son regard espiègle planté dans celui du mauricien. Quoi ? Il était jaloux peut-être ? Ok ok, on ne s’emballe pas comme pourrait s’emballer ta soeur. Il plaisantait juste. Mais elle aussi avait envie de plaisanter. N’était-ce pas ce qu’ils faisaient depuis le début ? Se chercher ? On était pas vraiment sûr de parler du même genre de taquinerie mais bon… Sun ouvrit la bouche pour répondre sur ce ton mais la voix qui se fit entendre la première fut celle de sa soeur : « Oh tu sais, le boulot ! C’est tout ma soeur ça, un vrai bourreau du travail ! Elle est architecte et je crois bien que ce sont ses premières vacances… Pas vrai Unnie ? T’as du mal à décrocher, je sais… Mais faut te détendre ! Ton chef de chantier adoré attendra, ok ? » Yu Ri lui sourit. Le sourire de Sun, en revanche, s’était crispé et elle considérait sa jeune soeur d’un air faussement neutre. Elle adorait sa cadette. Vraiment. De la famille, elle était de loin la moins ennuyante. Pétillante, dynamique… Elle était tout ce dont Sun pouvait rêver… Mais à cet instant précis, derrière son visage aux traits sereins, elle s’était vue la porter jusqu’à la plage qui bordait l’hôtel pour la noyer dans la première vague.
L’amour fraternel… !
« Mon chantier est terminé, sinon je ne serais pas ici. » dit-elle simplement en contenant sa frustration. Elle s’était également retenue de lui rappeler qu’il était 3h du matin en Corée du Sud et que son chef de chantier adoré - ?? - ne risquait donc pas de l’appeler puisqu’il devait dormir. De plus, si elle était bien sur son téléphone tout à l’heure : « J’appréciais seulement les photos d’aujourd’hui. » ajouta-elle en désignant son portable — bon d’accord, elle avait bien ouvert sa boite mail, mais elle l’avait fermée une minute plus tard !

Bref. Il était donc certain qu’elle avait préféré se replonger dans leur parcours magique plutôt que d’assister à un numéro de blagues ou de jonglage. Mais la perspective d’y voir Jin Hwa l’effectuer l’amusa et sa remarque un peu trop assurée pour qu’elle n’y croit pas un peu la fit craquer. Aussi, le rire qu’elle retenait s’échappa, claire et franc, mais elle le dissimula derrière sa main en se reprenant rapidement. « Je ne sais pas ce que j’aurais préféré voir alors… toi au ukulélé ou bien avec des quilles. » Jin Hwa avait l’air d’être un sacré baratineur mais la vérité c’est qu’elle ne peinerait même pas y croire s’il se mettait à jongler maintenant.

Peut-être même qu’elle aurait augmenté la note qui semblait tant lui déplaire. Elle était pourtant très belle sa note. Si elle consentait à lui donner un cinq, retirerait-il cette moue boudeuse sur sa figure ? C’était très énervant. Yu Ri, elle, un peu trop sous le charme, dirigea un regard presque vraiment courroucé vers sa soeur. « Tu exagères Unnie ! Tu vas blesser notre guide. » Bah voyons… une belle gueule et on changeait de camp, c’est ça ? Ces filles…
Elle se défendit néanmoins en exposant son point de vue. Bien sûr qu’il pouvait s’améliorer et qu’il devait le vouloir ! N’était-ce pas plus excitant d’avoir une perspective de progression ?
Excitant … ? Vraiment… ?
Le narrateur voyait le mal partout. Elle, elle ne faisait que répondre à ces regards que le guide lui lançait. Fourbe mauricien qui passait de l’enfantillage à des jeux moins innocents… Le sourire mutin de la blonde était au moins revenu sur ses lèvres. « Oui ? Tu as l’air sûr de toi. Nous verrons ça alors. » Et quelque part, elle aimait bien cette assurance. Ça faisait crépiter quelque chose dans son ventre. Quelque chose qui la poussait à se mordre un peu trop les lèvres ce soir.
Mais où est-ce elle allait au juste ?
Elle ne savait pas trop… mais elle avait hâte d’y être en tout cas.

Pour les plus innocents, on pouvait penser qu’elle faisait juste allusions à ces prochaines fois qu’elle insinuait clairement, car séduite par l’île. Et les services du guide. Alors oui, s’il était partant, Sun l’était plus qu’aussi. Et puis, elle avait sincèrement aimé cette première visite et pensait tout aussi sincèrement qu’il y avait bien d’autres choses à voir. Si elle sourit sous sa clémence, Yu Ri, elle, approuva en s’étirant, tout bras tendus vers le ciel : « C’est vrai que je suis éreintée, » dit-elle d’abord. « C’est sûr que ça changeait de la plage… mais ça valait le coup ! » Voilà qui ferait plaisir au guide ! La petite avait retenu la leçon ! Mais pour le coup, Sun Ri était bien d’accord.
« Eh bien, je pense que ça peut se faire. Moi ça me plairait beaucoup. » Yu Ri lança un regard en direction de la mer. On entendait le délicieux roulement des vagues jusqu’ici… « Hum… On aura toujours le temps de se baigner plus tard, » conclut-elle, visiblement résolue. Après tout, elle n’était pas certaine de trouver un aussi charmant vendeur de beignet demain.

Les boissons reçues, elles levaient leur verre mais l’ajout du mauricien fut très appréciable. Échangeant un regard allègre, les deux soeurs gardèrent leur verre levé et dirent : « Bon dans ce cas… » - « Alavot ! » Puis burent enfin une gorgée. Sun soupira. C’était frais et elle en avait bien besoin dans la chaleur de cette soirée… « C’est français, ça aussi ? » demanda Yu Ri en tournant un regard plein d’intérêt vers le mauricien. « On ne dit pas santé, en français ? » renchérit l’ainée en se remémorant avoir trinqué avec un couple de touriste français un soir à Séoul. En même temps, avec quoi n’avait-elle pas trinqué ?

Sur la scène, l’animation avait repris. Mais il n’y avait ni ukulélé, ni Jin Hwa. Et si elle entendit bien un fond de musique, elle ne tourna jamais la tête vers l’estrade. Elle était bien trop occupée à chercher le regard du seul artiste qui l’avait captivée. Lorsqu’ils eurent fini leur verre, la plupart des tables adjacentes à la leur s’étaient vidées. Les rares personnes qui restaient buvaient un dernier verre en plaisantant dans différentes langues que Sun n’essaya pas d’identifier. Yu Ri se détourna lorsqu’elle ne put s’empêcher de bailler, véritablement fatiguée par sa journée. Mais parce que sa soeur savait qu’elle ne l’avouerait pas, désirant passer le plus de temps possible avec son tendre guide, Sun fut celle qui dû mettre doucement un terme à cette fin de soirée des plus agréable : « Bien… Il se fait tard et même si on adorerait rester toute la nuit discuter avec toi, si on veut être en forme pour demain, il vaut mieux qu’on remonte vers nos chambres. » Croyez-la, elle aurait vraiment adoré ne pas avoir à écourter cet instant très plaisant… Mais peut-être ne le faisait-elle pas vraiment ?
… ?
Yu Ri afficha une moue déçue. Néanmoins, ses yeux pétillants n’avaient plus rien à voir avec le charme du mauricien et elle dû se rendre à l’évidence. « C’est triste… mais on se retrouve vite, pas vrai ? » Demain. Ils se revoyaient demain. Mais que signifiait ce clin d’oeil lancé en direction du jeune homme ? Lorsqu’elles se levèrent, Sun s’inclina poliment : « Bonne fin de soirée et bonne nuit… Sois en forme pour décrocher un 5. » Cette fois, c’est Sun Ri qui lança un clin d’oeil. On parlait bien de demain, n’est-ce pas ? « Si tu t’ennuies, ma chambre est juste en face de celle de ma soeur, au numéro 217. » - « Yu Ri ! » Sun l’a rabroua mais son regard et son ton n’était pas vraiment sévère… La cadette tira la langue et rit, comme s’il ne s’agissait que d’une plaisanterie. « A demain ! » Oui, c’était mieux…

( Pando )

ETE 2018 ▶

Architecte hein ? Elle pouvait bien bâtir des fondations sur son corps, il n’était pas contre cette idée.
…
Quoi ? C’était un métier un peu sexuel architecte non ?
Pas du tout. Sauf si on aimait le ciment et les gros camions mais ça, c’était une toute autre histoire. Une histoire sans rapport avec celle du jour où le mauricien avait noté mentalement le métier de la demoiselle. En réalité, c’était plutôt cool, ça sonnait assez intellectuel à son sens. Mais pour lui à la scolarité décousue, tout pouvait sans doute sonner de cette manière. Ce n’était pas comme s’il se définissait comme quelqu’un de particulièrement brillant. Il n’avait jamais réellement eu l’occasion de s’instruire dans le fond…. Ce qu’il connaissait, il l’avait appris sur le terrain et il savait déjà à son âge qu’il ne se vanterait jamais de posséder de jolis diplômes que sa famille pourrait accrocher sur des murs. Pour parler franchement, s’il avait balancé à Dae Hyun qu’il comptait faire des études après le lycée, il se serait probablement foutu de sa gueule dans de francs éclats de rire.

La dénommée Yu Ri avait coupé le jeu, il n’avait pas relancé la partie. Celle-ci avait bifurqué sur un terrain un peu plus idiot qui avait laissé un sourire planer sur ses lèvres « Mmh, si tu veux, j’essaie de faire les deux en même temps. » mais bien sûr… et est-ce que tu penses que ça peut te faire marquer des points ?
Pourquoi pas ? Il comptait bien sur sa “pouty face” alors jongler pouvait toujours marcher « J’ai fait de mon mieux aujourd’hui mais ça n’a pas été suffisant. » t’as fini oui ? Se servir de la petite soeur c’était moche !
Pour parler franchement, il aurait préféré qu’elle soit absente. Il n’avait pas besoin d’aide. Personne n’avait besoin d’aide avec le talent et un sourire charmeur pour confirmer une trop grande assurance avant de la reprendre « Tu verras. Moi, je suis déjà sûr. »

Tout comme il était déjà certain d’être embauché à nouveau le lendemain ?
Evidemment ! Il était un bon guide ! Il offrait même un service après vente de qualité !
Et il ne voulait pas se taire au passage ? Un guide silencieux, c’était pas mal non plus.
Quoiqu’il en soit, malgré ses occupations du lendemain, il avait offert de se privatiser à nouveau pour la journée, attendant ensuite une réponse qui n’avait pas tardé à venir dans le bon sens « Alors ça marche. Si vous voulez, pour la baignade, on fera un arrêt sur une plage plus jolie. » quoi ? Ce n’était pas incompatible les arrêts baignades ! Et on avait aussi manifestement le droit de boire avec ses clientes en laissant nos verres en rencontrer d’autres dans un cours de créole mauricien
« Non. C’est bien santé. ça c’était du créole. » on n’était plus à une langue près après tout.

Et il ne semblait pas non plus pressé par le temps puisqu’il avait bu tranquillement son verre avec les deux Bae des îles - sincèrement on va rester là-dessus ? - laissant filer les minutes sans réellement les voir passer. C’était souvent le cas quand on était en bonne compagnie, dans une conversation intéressante, ou dans une autre plus silencieuse au moyen de regards qui se passaient de mots. Le bâillement de la cadette avait ceci dit mis un terme à la télépathie. A la prise de parole de Sun Ri, il s’était redressé dans son siège jusqu’à finir par se lever. S’il avait d’abord ouvert la bouche pour répondre quelques mots, ceux de la directe Yu Ri l’avait fait rire.
En face de la 217 hein ?
Comment ça en face de la 217 ?! Est-ce qu’on t’y as invité aussi clairement en face de la 217 ?!
« Je suis toujours en forme, tu verras. » mais pas cette nuit, on s’entendait bien ? « Bonne nuit à toutes les deux, reposez bien vos yeux pour les préparer à voir encore mieux qu’aujourd’hui. » ce n’était pas des promesses en l’air, il avait encore beaucoup à montrer ? Tout particulièrement à Sun Ri dont le regard avait été trouvé par le sien une dernière fois après avoir salué les deux coréennes d’un dernier sourire. Il comptait bien décrocher plus haut qu’un ridicule 5… et avant demain.

Est-ce que c’était la raison pour laquelle, quelques minutes plus tard, sourire rempli d’assurance sur les lèvres, bras assurément posé pour épouser l’encadrement d’une porte, il donnait quelques coups contre cette dernière, celle d’une chambre qui, par le plus grand et le plus parfait des hasards, se trouvait pile en face de la 217 ?
Il n’avait plus de sucre, il voulait faire des beignets de banane, qu’est-ce qu’il y pouvait si c’était une jolie blonde au teint légèrement bronzée qui lui avait ouvert sa porte ?
On ne savait pas trop, mais ce dont on était certain c’était que la demande de sucre ne se faisait pas par télépathie. Il fallait prononcer quelques mots pour ça. En coréen, ça aurait été mieux. Il pouvait commencer par la saluer à nouveau, puis enchaîner sur une excuse avant de lui donner les raisons de sa venue.
Et certainement pas laisser sa main venir se presser contre une nuque après un rapide égarement de ses doigts dans ses mèches de cheveux qui gênaient le passage, encore moins se pencher vers une touriste qui l’avait payé pour sa journée, pour laisser ses lèvres… demander le sucre ? A moins que ce baiser n’était qu’un remerciement pour son embauche ? Dans le fond, on ne savait pas trop s’il aurait quelque chose de crédible à dire à son procès… est-ce qu’il pourrait prétendre avoir trébuché sur quelque chose et s’être rattrapé à des lèvres ? Ou est-ce qu’il aurait l’insolence de dire simplement qu’il en avait eu envie.

( Pando )

Summer nights 2018 ▶

De plus belles choses à voir… Comme une jolie plage, un splendide panorama, un jardin féérique… le sourire d’un guide ?
Hum ?
Rangeant distraitement ses affaires, Sun avait toujours le même sourire qui flottait sur les lèvres depuis qu’elle avait quitté leur table animée. Elle avait passé une bonne journée, une bonne soirée… et se languissait déjà du lendemain. Maurice était décidément une destination parfaite…
Elle avait souhaité bonne nuit à sa cadette qui avait disparu dans la chambre d’en face, épuisée. Nul doute que Yu Ri était allongée de tout son long sur le lit et qu’elle aurait bien été incapable de répondre à la moindre sollicitation si l’on venait toquer à sa porte. Elle plaisantait peut-être bien tout à l’heure…

Mais qu’en était-il de Sun Ri ? Elle était remontée dans sa chambre sans lancer la moindre invitation. Si elle ne s’était pas encore changée, ni même posée sur son lit, elle allait le faire n’est-ce pas ? Elle n’attendait personne, après tout. Pourquoi l’aurait-elle fait ?
Alors pourquoi ne fut-elle qu’à moitié surprise lorsqu’elle entendit qu’on toquait à sa porte ? Son coeur eut un léger sursaut et pourtant, quand il aurait simplement dû retrouver un rythme normal, il donna une série de coups rapides contre sa poitrine, lorsque son regard se tourna vers l’entrée. Ce n’était peut-être que sa soeur. Ce n’était [ï]sûrement[/ï] que sa soeur.
Elle mordit sa lèvre inférieure, dégagea ses oreilles de ses mèches blondes et fit les deux pas qui la séparait de la porte. Sans la moindre méfiance, elle ouvrit.

Ce n’était pas Yu Ri. Appuyée contre l’encadrement de la porte, se tenait devant elle une autre silhouette familière. Plus grande, plus masculine que sa cadette. « Jin Hwa. » Son souffle ne sonnait malheureusement pas assez étonné. Son regard non plus, brillant d’une lueur qui avait chatoyé toute la journée au fond de ses pupilles chaque fois qu’elle croisait ses mêmes yeux. « Tu as oublié quelque chose ? » Est-ce qu’elle y croyait vraiment ? Ne savait-elle pas pourquoi il était là ? Ne se l’étaient-ils pas dit tout au long de cette journée et plus clairement ce soir ?
Un frisson remonta le long de son échine lorsque la main du guide glissa contre sa nuque dans une caresse. Elle aurait dû se dégager, le pousser hors de sa chambre et fermer la porte, furieuse contre ses manières et ce manque de professionnalisme. Mais elle n’avait pas bougé, et la seconde suivante, ses lèvres accueillaient celles du jeune homme avec un peu trop de chaleur.

Sans un mot de plus, dans une inspiration coupée, elle enroula ses bras autour de son cou et l’attira dans la chambre en fermant la porte derrière eux. Sa bouche répondit à une autre et ses doigts se perdirent dans des cheveux qu’elle n’avait jamais exploré. Elle avait tant de choses à découvrir…
Ce n’était sûrement pas une façon de discuter du programme de demain. Ni de remercier un guide pour ses services. Ce n’était même pas un pourboire valable… Hum, alors c’était probablement cette note trop sévère que Jin Hwa venait contester.

( Pando )

ETE 2018 ▶

S’il avait oublié quelque chose ?
Bien sûr qu’il avait oublié quelque chose ! Il avait oublié de faire ses devoirs, d’aller à la messe le dimanche, d’apprendre les bonnes manières, d’être professionnel, comment on demandait du sucre dans la plupart des cultures, ou mieux encore… comment on disait bonsoir à notre cliente du jour qui serait également celle du lendemain.
Mais, d’aucune manière, il parviendrait à nous faire croire qu’il avait oublié quelque chose sur les lèvres de la demoiselle qui ignorait sans doute - pas trop - qu’elle avait ouvert la porte au grand méchant loup comme on le disait dans les contes. Certes, ce crétin se trouverait sans doute un autre rôle, mais quelle marraine la bonne fée saluait sa filleule de la sorte ? Cendrillon avait un panneau lumineux sur les lèvres ou quoi ? Pour qu’il se penche de cette manière et les trouve des siennes, on était en droit de se poser des questions.

Questions qui ne trouveraient sans doute pas de réponses ce soir vu que l’occupation semblait assez occultante au point que lui ne se fatigue même pas à prononcer un seul mot avant de trouver le goût des lèvres de sa jolie touriste. C’est qu’elle se les était tellement mordues dans la journée, il était bien normal de chercher à savoir ce qu’elles avaient de si attirantes en pressant davantage sa nuque à cette douce réponse.
Evidemment, on ne doutait pas qu’il n’avait pas pris la peine de jouer l’effarouché et qu’il s’était laissé entraîner dans cette chambre, celle face à la 217.
Il était triste de constater qu’au lieu de faire preuve de règles de bienséance, comme ils disaient jadis, son autre main s’était déposée dans le bas d’un dos, pressant une divine chute de reins pour rapprocher un corps du sien tandis que ses lèvres profitaient d’une autorisation silencieuse sans doute donnée par une porte refermée.

« L’heure... » c’était tout ce qu’il avait d’abord dit dans une courte pause, entre deux baisers.
L’heure ? Il avait oublié l’heure ?
« … à laquelle... » il aimait les longues phrases « … à laquelle... » il avait une vraie passion pour ces phrases à rallonge qui n’en finissaient plus « … je passe... » parce qu’elles devaient se couper sur des lèvres que les siennes retrouvaient tout en forçant un corps qu’il ne relâchait pas à progresser à reculons « … vous prendre... » ces longues phrases qui se ponctuaient d’une main qui relâchait une nuque un instant pour venir dénouer le noeud d’une ceinture à une taille « … demain... » est-ce que demain était un mot qui se soufflait scandaleusement ? Est-ce que parler se faisait sur ce ton à une demoiselle qui n’était encore qu’une inconnue le matin même. « … j’ai oublié de la préciser... » … quelle tête en l’air il faisait !
Et est-ce qu’il retrouverait la bonne formulation pour la préciser en repoussant un corps joliment vêtu d’une robe sur un lit tout en le suivant dans sa chute ?

Le tissu fin de la ceinture avait glissé entre ses doigts, le noeud n’avait plus tenu à rien, un prétexte comme un autre pour occuper sa main contre une nuque et piéger des lèvres contre les siennes. Si son autre main s’était, par le plus grand des hasard, exprimé sur une hanche, c’était peut être une façon mauricienne de dessiner un cadran afin de communiquer une heure.

( Pando )