les journées du japonais étaient épuisantes. entre les cours, les entraînements de football et les cours particuliers qu'il devait donner, il ne s'en sortait qu'à peine, réussissant à s'organiser pour n'avoir que de quoi faire ses propres devoirs en rentrant à l'internat le soir. il avait cependant besoin de cet argent et ne pouvait tout simplement pas arrêter de donner ces cours - il avait eu de la chance même, de trouver un travail si simple et autant à sa portée. bon en classe, il était régulièrement dans les premiers du classement, mais uniquement parce qu'il ne connaissait rien d'autre que les études.

il avait eu de la chance aussi de tomber sur taeyong comme élève. enfin, chance. c'était un rêve et un cauchemar en même temps, parce que taeyong était comme qui dirait son crush - et c'était justement ça qui rendait la chose si idyllique et frustrante en même temps. il peinait à se concentrer pendant leurs sessions presque quotidiennes, était souvent mal à l'aise, la peur de faire un mauvais pas et de se décrédibiliser devant celui qu'il idéalisait tant dans son esprit nouant sa gorge en plusieurs nœuds indémêlables.

après la demi-heure de transport en commun qu'il pouvait désormais payer grâce à son salaire, il arriva en plein milieu de gangnam, ses jambes le menant rapidement à la demeure des song. grande bâtisse impressionnante, valant probablement plus que yuki ne gagnerait dans toute sa vie, et il sonna, se laissant guider à l'intérieur par une des domestiques qu'il commençait à bien connaître. après une petite conversation superficielle, il arriva dans l'office où les deux se retrouvaient pour les cours. en s'approchant, il l'entend parler - il a l'air frustré, et c'est étonnant car il ne l'a jamais entendu parler ainsi. et puis son coeur s'arrête de battre un instant - comment est-ce que fait yuki ? c’est un génie.

une main agrippe sa poitrine pour se ressaisir rapidement et il attend quelques secondes avant de toquer à la porte pour faire signe de sa présence. bonjour, taeyong. murmure-t-il, n'osant pas croiser son regard. et il s'avance, les yeux rivés au sol, pour trouver sa chaise et sort, les bras fébriles, ses affaires. que veux-tu faire aujourd'hui? demande-t-il poliment alors qu'il s'affaire, n'oubliant jamais que le garçon en face de lui était son élève et son client, celui qui lui permettait de se payer à manger le midi, et qu'il ne pouvait pas se perdre en familiarités, comme leur avait précisé ses parents.

je suis pas si intelligent que ça t'as envie de crier, parce que c'est ce que tu penses. t'en est persuadé. t'as bossé dur pour en être où tu es, c'est-à-dire nulle part. abandonné par tes parents, à vivre dans un internat moisi où les fuites d'eau sont récurrentes. te privant de nourriture pour en donner à ceux qui en ont moins. vie charitable que t'as décidé de mener pour combler les trous dans ton âme, parce que t'en n'as que trop et ils sont douloureux. l'amour parental manque, fils unique t'as aucun frère ni aucune soeur pour rattraper ça. plus que des daddy issues, t'as probablement des life issue.

t'as du mal à reprendre ton souffle et à te calmer, à paraître normal. t'as pas envie d'être ridicule devant taeyong, parce qu'il pourrait te ruiner, te virer et te ruiner. briser ton coeur et vider ton porte monnaie, d'un claquement de doigt. ce serait si simple pour lui. tu lis directement ce qu'il te tend, quelques lignes sur un problème, et la solution te viens directement en tête. non ... c'est pas ridicule. chacun apprend à son rythme. tu lui réponds, le nez plongé dans le livre pour cacher tes joues cramoisies, palpitant au rythme de ton myocarde. en fait ... et il se met à expliquer en montrant les parties de l'énoncé, gribouillant quelques calculs sur une feuille volante. probablement pas la meilleure méthode pour que taeyong apprenne, il devrait faire les choses lui-même et tu devrais juste le guider. mais le voir perdu, c'est énervant. ce n'est pas la composition qui lui va, toi tu préfères quand il est assuré, sur de lui, qu'il sait ce qu'il fait. il est fait pour ça. tu comprends mieux? ta voix est ridicule tandis que t'essayes de le regarder dans les yeux pour paraître sur de toi, toi aussi. mais tu l'es pas, t'es intimidé, ce gars tiens ta vie dans ses mains et il ne le sait pas, il ne sait rien de toi. probablement juste que t'es ridiculement pauvre à cause de tes vêtements dépassés de mode et troués à quelques discrets endroits. t'arrives à coudre un peu pour les rabibocher, mais la plupart du temps .... et bien t'en as pas, de temps. trop occupé à essayer de maintenir ta vie et à survivre.